Année sociale 2014 : Vous avez dit grève générale au Maroc ?
Par Khalid Al Aymouni
Rabat – Incontestablement, l’année finissante aura été marquée par une tension palpable dans le dialogue social entre le gouvernement et les partenaires sociaux, notamment au sujet de la réforme du régime de retraite, allant jusqu’à pousser des centrales syndicales à lancer le 29 octobre dernier un appel pour une grève générale, avec le soutien des partis de l’opposition et plusieurs associations.
Une situation inédite puisque les syndicats dans leur bras de fer avec le gouvernement se contentaient, le plus souvent dans les années précédentes de décréter des grèves sectorielles mais pas au point d’envisager comme il a été le cas cette année une grève générale qui reste associée dans la mémoire collective à des événements douloureux.
Pourtant, la grève générale a eu lieu à l’appel de trois centrales syndicales (UMT-CDT-FDT), touchant la fonction publique et les secteurs semi-public et privé, et qui plus est, s’est déroulée avec le soutien de plusieurs autres syndicats, partis de l’opposition et associations.
Mais loin de représenter une menace pour la paix sociale, cette grève s’est déroulée dans la discipline et l’ordre. Tout à l’honneur des syndicats qui ont su gérer la situation avec responsabilité et aussi le gouvernement qui a pleinement respecté le droit à la grève. Ce qui a permis au pays d’être bien à l’abri des dérapages d’antan. Ainsi, la grève s’est passée sans le moindre incident, ni acte de vandalisme avec des taux de participation qui diffèrent d’un secteur à l’autre car certains employés dans le public et le privé ont choisi de travailler ce jour-là.
Une grève générale sans le moindre incident, c’est inédit. Cela montre la maturité de l’ensemble des composantes du champ politique et social et leur détermination à tourner la page. Cela montre aussi que les pouvoirs publics ne se cachent plus derrière l’argument de l’ordre public pour interdire les grèves et matraquer les grévistes. Un acquis de taille sur le chemin de la consécration de l’Etat de droit et de la promotion des libertés publiques.
Face à ce mot d’ordre de grève générale, le gouvernement a fait montre de pondération, réaffirmant son respect plein et entier du droit à la grève tout en se disant déterminé à aller jusqu’au bout de la réforme du régime de retraite et ne point se contenter de la solution facile en passant “la patate chaude” aux gouvernements qui suivront.
Le gouvernement par la voix de son porte-parole, ministre de la communication, Mustapha El Khalfi, a également assuré que le dialogue social n’est pas mort et qu’il ne cherche pas à se dérober à ses engagements tout en appelant les partenaires sociaux à assumer leur responsabilité.
De leur côté, les syndicats se sont arc-boutés sur leurs revendications, décrétant une grève générale pour le 29 octobre dernier tout en se félicitant de son succès avec un taux de participation, selon leurs quantifications, de 84 pc.
En réponse, le gouvernement s’est attelé à garantir un fonctionnement normal dans les établissements publics comme l’a souligné alors son porte-parole, tout en se félicitant du climat dans lequel s’est déroulé cette grève qui consolide ainsi les acquis du Royaume en matière de libertés et de droit de l’Homme.
Un point d’honneur à mettre à l’actif des syndicats, c’est leur mot d’ordre à l’adresse des employés et cadres de certaines unités de production et établissements stratégiques à porter seulement un brassard en guise de solidarité avec les grévistes et pour ne pas paralyser le pays. Car, au final, le service minimum doit être assuré malgré la grève.
Cela dit, l’année 2014 restera dans les annales syndicales comme étant un tournant dans la gestion des grèves. En revanche, l’année prochaine sera décisive pour savoir à quel point le gouvernement et les partenaires sociaux parviendront-ils à transcender leurs divergences sur des questions lancinantes, entres autres, les réformes du régime de retraite et de la caisse de compensation ?.
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