L’histoire dans le cinéma marocain, entre l’ambition des cinéastes et l’obstacle du financement

L’histoire dans le cinéma marocain, entre l’ambition des cinéastes et l’obstacle du financement

samedi, 15 février, 2014 à 14:53

Envoyé spécial : Ali Refouh

Tanger – L’histoire, une thématique à la fois fascinante et compliquée, ne cesse de séduire les cinéastes marocains, qui affichent l’ambition de mettre en relief les grands et les petits instants historiques de leur pays, mais c’est sans compter avec des obstacles d’ordre technique et financier propres à un genre cinématographique très coûteux.

“Nous avons la volonté de faire connaître aux Marocains leur histoire, mais les moyens manquent, surtout que les films historiques posent des problèmes techniques et financiers, car ils sont fondés sur la reconstitution aux niveaux des costumes, des décors, des accessoires, des personnages et de l’entourage”, souligne à ce propos Hamid Zoughi, réalisateur de “Boulanoir”, en lice dans la compétition officielle du long métrage au 15è Festival National du film à Tanger.

Devant ce dilemme, est-il question de s’abstenir de faire des films historiques en attendant que les moyens arrivent ? se demande M. Zoughi, dans une déclaration à la MAP, ajoutant que pour le moment et en l’absence d’un financement à la hauteur des ambitions, les réalisateurs essaient de manipuler les scènes, en recourant souvent à une sorte de tournage intimiste, avec un nombre réduit de personnages agissant dans un espace fermé.

“Le financement est un handicap majeur pour aborder la thématique de l’histoire et avec les budgets actuels, il est impossible de produire des films de cette taille. Le résultat est que le traitement final de cette thématique est, souvent, timide par rapport à cette grande histoire très riche”, souligne de son côté Fouad Souiba, auteur et réalisateur.

Ainsi, “l’histoire reste rarement visitée par le cinéma marocain, dans la mesure où elle pose énormément de problèmes et doit tenir compte de plusieurs paramètres, dont le cinéaste marocain n’est pas pour le moment responsable”, relève M. Souiba.

Pour M. Souiba, ce ne sont pas les atouts qui manquent pour la production de films historiques au Maroc. “Nous avons de très grands comédiens, des techniciens doués et des décors naturels magnifiques”, indique-t-il, ajoutant que les réalisateurs marocains “ne refusent pas d’aller aborder cette histoire, mais manquent des moyens nécessaires qui leur permettraient de s’entourer des spécialistes, chercheurs et profils nécessaires pour faire ce genre de films”.

Ce manque de moyens pousse les cinéastes “à rester liés à un espace de proximité qu’ils maîtrisent le mieux et à une actualité  sociale qu’il s’approprient dans leur activité quotidienne”, plutôt que de s’aventurer dans une production sur l’histoire qui demande un financement important, a-t-il remarqué.

Ceux qui tentent le coup, contre vents et marées, se trouvent obligés de détourner cette contrainte, non sans répercussion sur la qualité de la version finale. “Le réalisateur va être obligé de tourner en intérieur et se contenter des scènes qui ne coûtent pas beaucoup pour la production et sacrifier, ainsi, toutes les scènes qui vont donner du spectacle et assurer l’homogénéité du film”, affirme M. Souiba.

“Ca donne des films amputés de leur dimension historique, avec des personnages ordinaires et des scènes se déroulant dans un espace qui retranche à l’histoire toute sa dimension”, regrette-t-il.

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