Santé connectée: 4 questions à Dr Hassan Ghazal, président de l’AMTe

Santé connectée: 4 questions à Dr Hassan Ghazal, président de l’AMTe

vendredi, 14 mai, 2021 à 11:33

Casablanca – Dr Hassan Ghazal, président de l’Association marocaine de Télémédecine et eSanté (AMTe), présente dans une interview à la MAP, son point de vue quant au développement de la santé connectée au Maroc, ses opportunités mais aussi les risques qu’elle pourrait présenter.

1. Comment peut-on définir la santé connectée ?

L’e-santé ou santé digitale concerne l’application des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) à l’ensemble des activités en lien avec la santé. Le terme “santé connectée” est utilisé de manière interchangeable avec “e-santé”, “santé digitale”, “télémédecine” ou “télésanté”.

La “santé connectée” ne concerne pas uniquement les aspects cybersanté, e-santé, mHealth, télésoins, télémédecine ou de télésanté en tant que type de service isolé. Au fait, combinant de ce qui précèdent avec le potentiel de l’IoT en matière de collecte de données santé sensibles, la santé connectée offre une nouvelle dimension de la prestation de services de santé notamment si elle est assistée par les techniques de l’Intelligence Artificielle (IA).

L’une des définitions les plus complètes de la santé connectée, serait d’englober des termes tels que la technologie sans-fil, la révolution digitale, l’électronique embarquée, la technologie mobile et télésanté.

Les “objets connectés” ou “objets communicants” qui sont en train de révolutionner tous les secteurs, y compris celui de la médecine, sont capables de collecter et transférer les données santé des patients, notamment des signes vitaux (fréquences cardiaques, respiration, tension artérielle, température, etc.. ); traiter ces données; transmettre les résultats d’analyse obtenus aux professionnels de santé; ou encore sonner l’alerte en cas d’urgence.

La récupération des données via les objets connectés de santé permet aussi de faciliter le diagnostic en téléconsultation; d’assurer un meilleur suivi à distance des patients (télé-surveillance) ; d’aider les patients à suivre leur traitement efficacement; ou encore de faire de la prévention.

2. Quelle ampleur prend l’e-santé aujourd’hui au Maroc ?

Au Maroc, un certain nombre d’initiatives de santé connectée ont été lancées depuis une vingtaine d’années. Elles concernent divers domaines tels que la télé-pathologie, la télé-oncologie, la télé-radiologie, la télé-cardiologie ou la télé-échographie. Une initiative originale de télé-surveillance impliquant une boite connectée (smart box) qui concerne la “santé mobile de la tuberculose” a été initiée en 2014 par la coopération coréenne, pour améliorer l’adhérence au traitement de patient tuberculeux dans les régions de Salé puis Tanger. Tous ces projets sont restés malheureusement à l’état pilote.

Plus récemment, une initiative nationale de télé-médecine destinée aux zones reculées du monde rural a été lancée en 2018 par l’Université Mohammed VI des Sciences de la santé et la Société marocaine de télémédecine (SMT), en partenariat avec le ministère de la Santé, qui ambitionne de couvrir 160 sites à l’horizon 2025 repartis sur tout le territoire national. Un partenariat entre le CHU de Marrakech et la société indienne “HOPS” a été concrétisé pour établir des centres de télémédecine et instaurer le dossier électronique patient …

Cependant, il a fallu attendre la crise Covid-19 pour enfin voir les différentes composantes de la santé connectée prendre leur vrai envol, au Maroc comme ailleurs. Cette crise sanitaire a surtout montré l’importance de digitaliser le système de santé et elle est en train d’accélérer sa propagation et son adoption par le système de santé dans toutes ses dimensions.

Aussi a-t-on pu noter l’émergence de plusieurs plates-formes de téléconsultation, dont celle initiée par le ministère de la santé et l’ordre des médecins “www.tbib24”, ou encore “C3M Med-Help” par le Réseau des compétences médicales Marocaines du Monde (C3M). Une application à déploiement national de suivi et notifications en cas de contact avec une personne infectée (Wiqaytna) a été créée. Le digital intelligent est également mis au service de la campagne de vaccination.

3. Quels sont les avantages de ce nouveau support notamment en ce qui concerne la prévention, la sensibilisation et la promotion de l’accessibilité des populations aux soins de santé ?

Les objets connectés qui contribuent à l’évaluation de la santé prennent tout leur sens dans le domaine de la prévention et dans le domaine en vogue de la médecine personnalisée.

En termes de prévention, des objets intelligents comme les montre-capteurs d’activité, les tensiomètres électroniques, les pèse-personnes connectés, les capteurs de pression sanguine et bien d’autres encore jouent un rôle de plus en plus important.

En termes de médecine personnalisée, il est permis aujourd’hui, grâce à leur contribution, d’apprendre à gérer les comportements individuels et les habitudes de vie, non seulement des patients pour le suivi ou le traitement d’une pathologie mais également de tout un chacun pour le bien être quotidien.

Les DMC (dossier médical partagé) sont en train de permettre un grand développement de la télémédecine, qui correspond aux actes de médecine fournis à distance via les TICs et qui est une pratique médicale bien encadrée par la loi marocaine notamment le décret d’application du 25 juillet 2018, modifié récemment le 1 février 2021, suite aux contraintes imposées par la pandémie.

La santé connectée permet de disposer des informations appropriées entre les bonnes mains au bon moment. La santé connectée offre une nouvelle dimension de la prestation de services de santé, mais aussi de prévention, sensibilisation et promotion de l’accessibilité de soins de santé de qualité pour tous.

Les dispositifs, services ou interventions “connectés” sont conçus en fonction des besoins des patients, et les données relatives à leur santé sont collectées et partagées de manière à ce que les patients puissent recevoir des soins de la manière la plus proactive et la plus efficace.

D’autre part, les médias sociaux, en tant que composante de la santé connectée, stimulent la mise en relation d’un grand nombre de producteurs de l’information santé : des médecins, des patients, des journalistes, ou des firmes pharmaceutiques. À travers ces réseaux, les patients recherchent des indications, des expériences, des avis et surtout des conseils voire des astuces.

Le patient recherche un soutien émotionnel basé sur l’expérience des autres patients surtout dans le cas de maladies chroniques ou graves.

L’accès à l’information en santé via Internet participe à la construction d’une forme de responsabilisation et d’autonomie. Les applications de santé connectée, par exemple, ne cessent de se multiplier de jour en jour, pour différentes causes. Ces applications sont souvent liées avec des objets intelligents connectés qui permettent la mesure et la collecte de données de santé.

4. En revanche, quels sont les risques qui peuvent se présenter dans ce sens, particulièrement à travers les réseaux sociaux ?

Avec l’émergence du digital ces dernières années, faire l’impasse sur les réseaux sociaux est aujourd’hui inenvisageable pour les entreprises. De là, l’apparition d’une nouvelle tendance de publicité sur les médias sociaux effectuée par des personnes très suivies ou des influenceurs, malheureusement, ni contrôlées ni régulées.

Il n’y a aucune loi, ni organisme qui veillent à ce que les produits présentés soient corrects et conformes. Ce qui peut représenter en effet un danger pour un secteur aussi sensible que celui de la santé, notamment par l’achat en ligne de produits médicaux sans prescription ni avis médical direct.

Cela nous amène à la question de la sécurité et de la confidentialité des données personnelles santé. Chaque pays fait en sorte d’établir des lois qui permettent la protection des données de ses citoyens. Au Maroc, La Commission Nationale de Contrôle de la Protection des Données à Caractère Personnel (CNDP), instituée par la loi 09-08, veille au respect des règles auxquelles doivent se conformer les organismes publics et privés avant et lors du traitement des données à caractère personnel dont celles relatives à la santé. Il faudra noter et saluer que la nouvelle version du décret d’application sur la télémédecine, adoptée par le conseil du gouvernement le 14 janvier 2021, a introduit la nécessité d’avoir l’aval de la CNDP au préalable de la demande d’autorisation de pratique de télémédecine qui vise notamment les aspects de garantie de confidentialité et sécurité des données de santé du patient.

Les médias sociaux constituent aujourd’hui des canaux de communication immédiats et incontournables, rassemblant des usagers de tout bord et de tous les âges. Ils sont de plus en plus consultables à la recherche d’informations dans tous les domaines, dont la santé. Paradoxalement, ils exposent les médecins et les patients à plusieurs risques et problèmes, et soulèvent de nouvelles questions : les médecins ont-ils le droit de communiquer avec leurs patients via les réseaux sociaux?

Derrière chaque réseau social, il y a une organisation, donc un stockage de la donnée. Qu’en est il des données santé? Les patients sont-ils conscients des risques du partage de données confidentielles concernant leur propre santé? Sont-ils avertis que sur internet, on ne peut rien contrôler? Savent-ils que des informations médicales partagées sur Facebook ou Instagram par exemple les transforment en informations publiques.

Une série de préconisations peuvent être proposées pour une exploitation responsable des données de santé générées par les patients sur les réseaux sociaux, dans l’intérêt des patients et le respect de leurs droits : favoriser l’exercice effectif du droit à la portabilité des données de santé générées sur les réseaux sociaux, à l’initiative et sous le contrôle des utilisateurs; sensibiliser à une exploitation transparente et respectueuse des droits des utilisateurs des réseaux; permettre un accès aux bases de données comprenant les données rendues publiques sur les réseaux sociaux par leurs utilisateurs, pour les acteurs de la recherche publique; ou développer des partenariats entre les pouvoirs publics et les réseaux sociaux pour permettre une diffusion efficace des campagnes publiques de prévention ou le recrutement pour les projets de recherche publique.

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