Les archives, un indispensable outil de connaissance et de réflexion pour éviter les effets pervers de toutes formes d’amnésie culturelle (Directeur)
– Par : Hajar EL FAKER –.
Rabat – Les archives constituent partout un indispensable outil de connaissance et de réflexion pour éviter les effets pervers de toutes formes d’amnésie culturelle ou autre, dont les effets à long terme peuvent se révéler “ravageurs, a souligné, vendredi soir à Rabat, le directeur des Archives de Maroc, Jamâa Baïda.
“Leur absence ou leur mutisme menaceraient l’épanouissement d’une forme particulière d’intelligence collective. Sans de telles archives, c’est la mémoire de la créativité d’un pays ou d’une époque, d’une culture et d’un savoir faire, d’un groupe ou d’une personnalité qui en disparaissant serait menacée d’appauvrir notre horizon de référence “, a-t-il révélé lors d’une conférence débat sous le thème “Archives d’Architecture: Histoire, actualité et avenir d’une nécessaire pratique culturelle et scientifique, le cas de la France et du Maroc”.
M. Baïda a également fait observer, lors de cette rencontre initiée conjointement par l’Institut Français du Maroc et les Archives du Maroc, que les archives d’architectures et d’urbanisme sont particulièrement significatifs et nécessaires, dans la mesure où ces deux disciplines contribuent fortement et durablement à matérialiser la plupart des facettes de l’environnement, bâti de toute société, au point d’en constituer un fidèle miroir qu’il convient alors d’interroger et d’interpréter.
“Que de fois nous restons bouche bée en admiration devant une œuvre architecturale, tout en nous efforçant de comprendre son contexte et les messages que son auteur a voulu véhiculer. Et souvent, en l’absence d’archives, c’est bien la rubrique des spéculations que nous alimentons”, a-t-il martelé, ajoutant qu’une approche exacte devrait puiser dans des archives qui contiennent souvent les informations essentielles pour connaitre les œuvres.
Le directeur a, par ailleurs, mis en avant la période du Protectorat au Maroc qui a connu des aménagements importants du territoire, d’urbanisme, et d’architecture, notant que le paysage des villes anciennes en a été métamorphosé, sans parler des villes nouvelles quasiment créées à partir de rien, ou presque.
“Ces aménagements ont cependant épargné le paysage traditionnel des cités devenues une source d’inspiration. Il y avait une politique et des hommes derrière tout cela et les archives nous ont heureusement gardé certains noms d’architectes et d’urbanistes qui ont travaillé sous Lyautey, premier Résident général de France au Maroc (1912-1925), ou encore d’autres hommes dont l’impact a été déterminant dans ces transformations, tels que Jean-Claude Nicolas Forestier, Henri Prost ou encore Maurice Tranchant de Lunel auquel Lyautey avait confié dès novembre 1912 le service des Antiquités, des Beaux-arts et monuments qui venaient de voir le jour”, a-t-il souligné.
De son côté, M. Jean Dethier, ancien architecte et commissaire d’expositions sur l’architecture au Centre Pompidou, a souligné que “le Maroc a été un acteur très important du début du siècle du renouveau de l’architecture pendant le protectorat et après l’indépendance.
“Un renouveau qui s’est exprimé aussi bien à travers l’architecture public que privé et à travers l’urbanisme et les stratégies d’habitats », a-t-il relevé.
Ayant travaillé au Maroc pendant cinq ans au ministère de l’urbanisme et de l’habitat, ce fondateur du CERF à Rabat, un centre d’archives dédié à l’aménagement des villes au Maroc au 20ème siècle, a souligné la nécessité de conserver et rassembler les archives d’architecture de manière à ce que les chercheurs puissent disposer d’archives de travail qui permettent d’éclairer l’avenir en se référant à l’histoire.
Tout en évoquant la citation de Winston Churchill, qui dit que “les Nations sans mémoires sont des nations sans avenir”, M. Dethier a relevé qu'”il est particulièrement “important et significatif” que se développent ici les archives, dans un pays comme le Maroc, qui a beaucoup d’avenir et une histoire magnifique”.
Ce spécialiste d’archives d’architecture a, en outre, précisé que cette rencontre constitue une occasion d’explorer les possibilités de coopération de développement dans une circonstance très particulière puisque le Maroc a décidé de se doter, à très court terme, d’archives nationales très ambitieuses.
Il a, dans ce sens, salué l’initiative des Archives du Maroc à vouloir envisager de créer un département consacré aux archives d’architecture.
Pour sa part, le conservateur du patrimoine (spécialité Archives), qui dirige à Paris le Centre d’archives d’architecture du 20ème siècle depuis 1995, David Peyceré, a indiqué que la notion et la pratique culturelle de l’archivage scientifique des dessins, maquettes et de bien d’autres témoignages de l’histoire de l’architecture et de l’urbanisme moderne sont devenues, depuis quelques décennies déjà, un réel besoin dans de nombreux pays, notamment en France où l’État assume un rôle pilote dans ce domaine.
Cette démarche est désormais incontournable pour assurer la survivance et la pérennité à long terme tout comme la consultation, d’une masse considérable et très diversifiée de documents et objets, souvent fragiles et vulnérables, a-t-il précisé, soulignant que depuis quelques décennies, peu de professions ont donné lieu à une collecte aussi continue et riche dans le monde entier, et à des archives privés aussi densément conservés.
“Si leur consultation est le fait d’un lectorat limité, leur visibilité, qu’on pourrait dire involontaire, est en fait grande, à travers la mise en valeur de l’architecture qu’elles décrivent”, a-t-il fait observer.
Tout en passant en revue la distinction entre les archives privées et publiques, les fonds d’archives et les archives des architectes, M. Peyceré a expliqué qu’au fil du temps, des édifices ou des quartiers de plus en plus récents sont, “patrimonialisés” et c’est la façon la plus évidente de sensibiliser le plus grand nombre à l’architecture.
“Cette activité doit se faire à une échelle locale, même si l’histoire fait que des sources sont conservés hors sol”, a-t-il dit, notant que cette conservation ne peut se faire sans un minimum de moyens, ni de volonté notamment individuelle au moins dans un temps de lancement.
Sous réserve qu’elles soient conçues et gérées selon les règles exigeantes d’un nouvel “art de sauvegarde du patrimoine”, ces archives constituent une ressource vivante indispensable aux chercheurs, enseignants et étudiants, aux historiens et à tous ceux et celles qui assument la nécessaire “mission d’interroger l’histoire pour mieux comprendre le présent et éclaircir l’avenir”.
En Europe ces archives, se sont révélées importants pour permettre d’assumer un regard analytique et critique propre à toute recherche culturelle approfondie, aboutissant ainsi à la réalisation d’expositions et de livres, de mémoires et de thèses, de colloques, d’essais, d’articles, ou d’autres expressions d’un savoir vivant.
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