Fortement touchée par la déforestation de l’Amazonie, la Colombie mise sur la coopération régionale pour sauver le “poumon de la planète”
Mohammed BEN MESSAOUD.
Bogotá – A l’instar des autres pays d’Amérique du Sud, la Colombie, pays le plus biodiversifié de la planète après le Brésil, est confrontée à une vague de déforestation effrénée de sa forêt amazonienne.
Les chiffres sont particulièrement alarmants. Le pays sud-américain qui abrite 483.119 km2 sur les 5,5 millions de km2 de la superficie totale de l’Amazonie, soit environ 6%, a perdu en 2018 plus de 197.000 hectares de forêts, une superficie équivalente à celle de la ville de Berlin (Allemagne).
Selon un rapport officiel du ministère de l’Environnement et du développement durable, 70,1% de ces surfaces déboisées se trouvent dans la région amazonienne (sud), soit l’équivalent de 138.176 hectares.
Bien qu’ils représentent une baisse de 10% de la déforestation par rapport à l’année 2017 (219.973 hectares), ces chiffres cachent mal une triste réalité. Le taux de déforestation de l’Amazonie a augmenté de 5% en comparaison avec l’année précédente (65,5%), explique pour sa part l’Institut d’hydrologie, de météorologie et d’études environnementales (Ideam, gouvernemental).
Les départements de Caqueta et de Meta, où de nouveaux groupes armés dédiés au narcotrafic, à la contrebande de bois et aux extractions minières illégales ont pris la relève de l’ex-guérilla des Farc dissoute après l’accord de paix de 2016, sont les plus touchés par ce phénomène avec 89.477 ha de forêts décimés, soit l’équivalent de la superficie totale de l’archipel caribéen d’Antigua-et-Barbuda.
Entre avril 2018 et mars 2019, les départements situés à l’ouest de l’Amazonie ont perdu près de 99.000 ha de forêts, indique la Fondation pour la conservation et le développement durable (FCDS, selon son sigle en espagnol).
“Nous assistons à une déforestation hyper-accélérée dans certains secteurs qui affecte la connectivité des biomes andino-amazoniens et des cycles hydrologiques. Les institutions sont incapables de faire face à l’extension de la frontière agricole. L’absence de contrôle territorial incite à l’élargissement de cette frontière”, déplore Rodrigo Botero, directeur de la FCDS, dans un documentaire, réalisé après avoir survolé huit fois l’Amazonie depuis le début de l’année 2019.
Plus pessimiste, l’ONG Dejusticia a de son côté lancé un cri d’alarme affirmant que “si le taux de déforestation reste au même niveau, la Colombie perdrait d’ici à 2020, plus de 800.000 hectares de forêts : soit cinq fois la taille de la ville de Bogotá”.
Tout récemment, le député Mauricio Todo, du parti Alianza verde (Alliance verte), a annoncé avoir déposé à la Chambre des représentants un projet de loi relatif à la gestion intégrale des incendies de forêts après été avoir été approché par une équipe de chercheurs en écologie du paysage et de modélisation des écosystèmes de l’Université nationale de Bogotá qui lui ont remis un rapport scientifique alarmant sur les incendies en Amazonie colombienne.
“La Colombie n’a pas la capacité pour réagir ou prévenir un scenario de feu de forêt comme que celui qui frappe actuellement l’Amazonie”, a jugé le député.
Selon l’Ideam, l’élevage extensif, le brûlage à des fins agricoles, l’extraction illégale de minerais ainsi que les narco-plantations et les infrastructures routières sont les causes principales de la prolifération de la déforestation dont souffre le pays sud-américain.
La Colombie s’était engagée à réduire à zéro la déforestation en 2020, mais les experts doutent de la capacité du pays à tenir cet engagement.
En dépit d’un manque de moyens criard, la Colombie tente tant bien que mal de faire face à ce phénomène pour en atténuer l’ampleur. Dans ce cadre, le pays s’est doté en septembre 2018 d’un Conseil national de lutte contre la déforestation, chargé entre autres de proposer au gouvernement des politiques, des plans, des programmes et des stratégies de lutte contre la déforestation.
Composé notamment des ministères de l’Environnement, de la Défense, de la Justice, des Mines, du Parquet général, du commandement général des forces armées et de la police nationale, cette structure a également pour mission d’évaluer les progrès réalisés dans la lutte contre ce phénomène et de coordonner la coopération internationale dans ce domaine.
En mai 2019, le président Ivan Duque avait annoncé depuis le Parc naturel national de Chiribiquete, au cœur de la forêt amazonienne, la mise en place du Plan Artemis pour lutter contre la déforestation donnant ainsi le coup d’envoi d’une grande offensive contre ce fléau.
Tout un symbole car le parc a été déclaré en 2018 par l’Unesco patrimoine mixte de l’humanité, en raison de sa contribution importante à la préservation de la biodiversité et des écosystèmes naturels de la planète et de la présence des communautés natives aux manifestations culturels diverses.
L’opération Artemis vise entre autres à freiner l’”hémorragie” de la déforestation de la forêt tropicale du pays, selon les termes du président Duque.
La coopération internationale constitue un axe important dans la stratégie de Bogotá en matière de lutte conte ce fléau écologique.
Dans ce cadre, la Colombie et la Grande Bretagne ont signé en juin dernier un accord en vertu duquel le gouvernement de Londres s’est engagé à allouer au pays sud-américain une aide financière de 8,5 millions de livres sterling, soit l’équivalent de près de 11 millions d’euros, destinés à la protection de l’environnement.
Cette aide sera consacrée entre autres à la lutte contre la déforestation et les crimes environnementaux, à l’encouragement de l’usage durable de la biodiversité et à l’accélération de la transition énergétique à travers la mise en place de programmes visant à promouvoir l’usage des énergies renouvelables et la mobilité durable.
Au niveau régional, la Colombie s’est fortement investie ces derniers temps pour réunir autour de la même table les pays amazoniens pour se mettre d’accord sur les moyens à mettre en oeuvre afin de protéger le “poumon de la planète”.
C’est ainsi qu’un sommet régional sur l’Amazonie s’est tenu vendredi dernier à Leticia, chef-lieu du département d’Amazonas (sud de la Colombie), à l’initiative du président Ivan Duque et de son homologue péruvien, Martin Vizcarra, et auquel ont pris part également les chefs d’Etat de la Bolivie, Evo Morales, de l’Équateur, Lenín Moreno, ainsi que le vice-président du Suriname, Michael Ashwin Adhin, le ministre brésilien des Relations extérieures, Ernesto Araújo, en tant que représentant du président Jair Bolsonaro, et le ministre des Ressources naturelles du Guyana, Raphael Trotman.
Le sommet a été sanctionné par l’adoption du “Pacte de Leticia pour l’Amazonie” visant à préserver les ressources naturelles de la plus grande forêt tropicale du monde, dévastée cet été par des incendies sans précédent notamment au Brésil qui abrite 60% de ce vaste territoire.
Outre des actions conjointes pour la protection de la forêt et la prévention, le texte prévoit la coordination des pays de la région pour lutter contre les causes de la déforestation, telles que l’exploitation minière, le trafic de drogue et l’extension illégale de la frontière agricole.
Il stipule de même la création d’un réseau amazonien de coopération pour faire face aux catastrophes naturelles, ainsi que pour mobiliser des ressources publiques comme privées afin de mettre en oeuvre les mesures convenues.
Les objectifs communs tracés par le Pacte de Leticia “nous engagent et nous poussent à protéger notre Amazonie”, a déclaré à cette occasion le président colombien Ivan Duque.
Forêt tropicale la plus vaste de la planète, l’Amazonie est considérée comme un trésor de biodiversité unique au monde : un quart des espèces mondiales y sont présentes, soit quelque 30.000 espèces de plantes, 2.500 de poissons, 1.500 d’oiseaux, 500 de mammifères, 550 de reptiles et 2,5 millions d’insectes, selon l’Organisation du Traité de coopération amazonienne (OTCA).
Véritable réservoir de carbone, la forêt amazonienne absorbe 90 à 140 milliards de tonnes de CO2, ce qui contribue à réguler le réchauffement climatique dans le monde, selon le Fonds mondial pour la nature (WWF).
L’Amazonie, habitée par des peuples indigènes, recèle d’importantes ressources minières tels que l’or, le cuivre, le fer, le nickel et le manganèse.
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