Coronavirus : pénurie des masques et produits de prévention au prix fort sur le marché noir en Thaïlande

Coronavirus : pénurie des masques et produits de prévention au prix fort sur le marché noir en Thaïlande

mercredi, 12 février, 2020 à 13:52

-Par Driss Hidass-
Bangkok – En Thaïlande, le deuxième pays en termes d’infections au nouveau coronavirus, les gens sont confrontés à une pénurie de masques faciaux et des gels désinfectants qui ont totalement disparu des pharmacies et des rayons des supermarchés pour être vendus au prix fort sur le marché noir.

Malgré les menaces de sévir de la part des autorités, les prix des deux précieux produits continuent de grimper sur le marché noir au point que beaucoup ont renoncé à ces moyens de protection contre l’épidémie.

Si le prix des masques chirurgicaux a été fixé entre un et deux bahts la pièce, le prix sur les étals du marché noir, disséminés un peu partout à Bangkok, varie de 10 à 20 bahts, soit dix à vingt fois le prix réel de ces articles en papier jetables.

C’est simplement impossible d’utiliser systématiquement ces masques qu’on doit changer plusieurs fois par jour pour une protection efficace, assure
Tanaphon, un habitant de Bangkok, qui, comme beaucoup d’autres, a renoncé à porter cette ultime protection contre l’épidémie qui menace.

Sa modeste bourse ne lui permet pas de s’acheter ces fameux masques faciaux jetables en quantité suffisante pour lui et sa famille. «C’est trop cher pour moi et pour beaucoup de gens», déplore-t-il, assurant qu’il s’en tient au lavage des mains à l’eau comme prévention élémentaire puisque les gels désinfectants ont aussi disparu des commerces et sont proposés à des prix exorbitants sur le marché noir.

A Silom, dans un dédale de ruelles où se côtoient la fameuse street-food thaïlandaise, petites échoppes où l’on vend un peu de tout et vendeurs de babioles, de nouveaux étals ont fleuri à chaque coins de rues proposant les fameux masques faciaux et du gel désinfectant à des prix très élevés. Inutile de marchander, l’on vend souvent à l’unité et non au paquet dans des conditions d’hygiène fort douteuses.

Les prix sont déjà trop élevés pour les locaux, mais pour les étrangers ils le sont davantage : ils passent du simple au double.

Après plusieurs semaines de pénurie, il est évident de constater que peu de gens portent les masques faciaux dans les rues, même si la psychose et la crainte d’attraper le virus est bien présente.

Alors que les messages pressants pour la prévention emplissent les médias, notamment en ce qui concerne le port du masque facial et le nettoyage régulier des mains aux désinfectants, il est désormais impossible de se procurer dans les commerces et les différentes enseignes des dépanneurs ces deux articles à Bangkok, la métropole où la plupart des cas du nouveau coronavirus ont été détectés.

Juste après l’apparition du nouveau coronavirus à Wuhan, épicentre de l’épidémie, la Thaïlande a été le premier pays à enregistrer un cas confirmé du nouveau coronavirus en dehors de la Chine.

Samedi dernier, le ministère thaïlandais de la Santé a signalé sept nouveaux cas de coronavirus, dont trois Thaïlandais et quatre Chinois. Ces nouveaux cas portent le nombre total des cas confirmés à 32, alors que des dizaines de personnes ont été hospitalisés en quarantaine à titre préventif. La Thaïlande arrive ainsi en tête des pays les plus exposés à la propagation de l’épidémie, et déjà la semaine dernière, ce pays d’Asie du Sud-Est a «exporté» son premier cas de coronavirus avec le développement de la maladie chez une touriste sud-coréenne de retour d’un voyage à Bangkok.

Face à cette situation, les autorités thaïlandaises ont menacé de sévir sévèrement contre les responsables de la pénurie organisée des outils de prévention contre la pandémie, à un moment où des experts prévoient une inévitable flambée de l’épidémie. «Les personnes qui stockent illégalement ou vendent ces deux articles à des prix élevés encourent une peine de sept ans de prison et une amende de 140.000 bahts», a déclaré le ministère thaïlandais du commerce.

Or depuis, la pénurie et la vente de ces deux produits sur le marché noir se poursuivent et aucune mesure coercitive effective n’a été entreprise pour réprimer cette fraude qui alimente la psychose et l’inquiétude.

De plus, la pénurie des masque faciaux semble impacter doublement la population. En plus des risques sanitaires liés à l’épidémie, les habitants sont désormais sans défense face à la pollution de l’air qui nécessite le port des masques contre la pollution. Depuis des mois, Bangkok arrive en tête du classement des villes les plus polluées au monde avec de fréquentes alertes à des pics de pollution de l’air dangereux qui ont nécessité la fermeture des écoles.

Par ailleurs, la Thaïlande s’est démarquée des autres pays de la région dans les mesures de prévention à ses frontières. Alors que l’épidémie de coronavirus continue de progresser en Chine, la Thaïlande n’a pris aucune mesure de restriction concernant l’entrée des touristes chinois.

Le pays a même maintenu une dispense de visa à l’arrivée, mise en place avant le déclenchement de l’épidémie pour attirer davantage de touristes chinois.

Une attitude qui contraste nettement avec les mesures de protection prises par d’autres pays dans la région, comme Singapour qui a interdit l’entrée sur son territoire de toute personne en provenance de Chine ou ayant transité par ce pays.

Selon le dernier recensement du Bureau de l’immigration, plus de 100.000 touristes chinois séjournent toujours en Thaïlande, dont 2.038 sont originaires de la ville chinoise de Wuhan, l’épicentre de l’épidémie, et 12.256 de Guangzhou, qui est proche de Wuhan.

“Nous contrôlons à 100% la situation”, a déclaré à plusieurs reprises le Premier ministre thaïlandais Prayuth Chan-ocha au public depuis le début de l’épidémie.

La Chine est le premier marché émetteur de touristes pour la Thaïlande. Près de 11 millions de touristes chinois (sur un total de 39,8 millions) ont visité la Thaïlande en 2019.

Les vacanciers chinois, dont beaucoup voyagent en groupe, ont dépensé près de 552 milliards de bahts (18 milliards de dollars) en Thaïlande l’année dernière, soit plus du quart du total des recettes du tourisme, qui représente globalement près de 20% du PIB du pays. Une manne que la Thaïlande n’est pas prête à négliger.

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