Coronavirus: L’heure est à l’inquiétude en Europe

– Par : Afaf Razouki –

Bruxelles – Après l’euphorie de la liberté retrouvée avec le déconfinement, l’heure est à l’inquiétude en Europe où l’épidémie de coronavirus semble resurgir suite à des semaines d’accalmie.

Un peu partout en Europe, le constat est le même et les chiffres viennent sonner la sonnette d’alarme que le virus continue de circuler vivement après avoir fait plus de 200.000 morts dans le Vieux continent.

En Belgique, la crainte d’une deuxième vague épidémique occupe les esprits, alors que les cas de contamination ce cessent d’augmenter depuis plusieurs jours.

Selon les dernières données des autorités sanitaires belges, le nombre moyen d’infections au coronavirus s’élève à 278,9 par jour entre le 17 et le 23 juillet, ce qui représente une augmentation de 71% par rapport à la semaine précédente.

Par ailleurs, le taux de reproduction du coronavirus (R0) a repassé la barre critique de “1”, s’élevant désormais à 1,44, tandis que le nombre de nouveaux cas pour 100.000 habitants continue également d’augmenter.

Ainsi, pour la période s’étalant sur deux semaines, et jusqu’au 22 juillet inclus, 24,6 cas pour 100.000 habitants ont été recensés en Belgique, ce qui a valu au plat pays de passer en orange sur la nouvelle carte de l’évolution de la pandémie de coronavirus publiée par le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), après avoir dépassé la barre des 20 contaminations par 100.000 habitants ces deux dernières semaines.

Cette carte de l’ECDC aide notamment les pays européens à établir leurs conseils de voyages à l’étranger pour leurs citoyens suivant l’évolution de la situation épidémiologique dans chaque pays. Le fait de placer le pays en zone “orange” signifie que les voyages en Belgique sont désormais déconseillés.

Face à cette évolution préoccupante de la situation épidémiologique, les autorités belges ont voulu prendre rapidement les choses en main, en décidant jeudi dernier de durcir les mesures contre le coronavirus.

“Les derniers chiffres ne doivent pas nous affoler mais être pris au sérieux. Il y a un rebond du nombre de nouvelles contaminations. Ce n’est pas anormal avec le processus de déconfinement, mais ça doit rester sous contrôle”, a souligné la Première ministre belge à l’issue d’une réunion du Conseil national de sécurité (CNS), insistant que “la contrepartie de nos libertés retrouvées, c’est la prudence absolue”.

Les mesures décrétées par le CNS et entrées en vigueur samedi portent notamment sur l’élargissement du port du masque et le renforcement du traçage des contacts.

Par ailleurs, vu la disparité de l’épidémie sur le territoire belge avec la grande majorité des nouveaux cas se concentrant en Flandre, il a été décidé de doter les bourgmestres (maires) et les autorités locales de compétences spécifiques allant le cas échéant jusqu’au confinement.

Selon la Première ministre belge, l’objectif est d’éviter “à tous prix” un reconfinement général, mais “il faut prendre des mesures qui s’imposent quand elles s’imposent”. Dans ce sens, le CNS se réunit à nouveau ce lundi pour examiner des mesures supplémentaires et envisager une approche locale forte pour les zones les plus touchées.

En France, la situation n’est guère plus rassurante avec une circulation du virus “en nette augmentation”.

“La circulation virale est en nette augmentation en France avec un taux de reproduction de 1,3”, a ainsi averti la Direction générale de la Santé (DGS).

“Nous avons effacé une bonne partie des progrès que nous avions accomplis dans les premières semaines du déconfinement”, a déploré la DGS, appelant à un meilleur respect des mesures de prévention, en particulier la nécessité pour les personnes testées positives de s’isoler.

Selon Santé publique France, le nombre de cas détectés a augmenté de 66% en trois semaines, tandis que 209 foyers épidémiques actifs sont recensés dans le pays.

Le ministre de la Santé Olivier Véran a pointé du doigt le “relâchement” des Français depuis le début du déconfinement, faisant état de “signes inquiétants” de reprise de l’épidémie.

Afin de freiner la propagation du coronavirus qui a déjà fait plus de 30.000 morts dans l’Hexagone, le gouvernement français a décidé notamment de généraliser les tests de dépistage à l’arrivée pour les voyageurs venant de 16 pays où le virus circule fortement, tandis que le port du masque est obligatoire dans les lieux publics clos.

En Espagne, la flambée épidémique se confirme également avec près d’un millier de cas quotidiens ces derniers jours, selon les bilans officiels.

Le nombre de cas rapporté à la population a triplé en deux semaines, tandis que plus de 280 foyers sont surveillés de près par les autorités.

Si le rythme de l’épidémie s’accélère sur le territoire espagnol, la situation épidémiologique est particulièrement inquiétante dans les régions de la Catalogne et d’Aragon.

Les autorités locales ainsi décidé de serrer la vis, en réinstaurant des restrictions pour tenter de contrer la propagation du virus. Le gouvernement régional catalan a même invité les habitants de Barcelone et de sa banlieue à ne sortir de chez eux que pour des tâches indispensables.

Face à cette recrudescence des contaminations, la Norvège a imposé des restrictions sur les voyages vers l’Espagne, tandis que le Premier ministre français Jean Castex a “vivement recommandé” aux Français d'”éviter” de se rendre dans le pays ibérique, plus précisément dans la région de la Catalogne.

Malgré la hausse significative des cas de coronavirus dans le pays, le gouvernement espagnol affirme que la situation est “sous contrôle” et que les foyers sont “localisés et isolés”, estimant qu’il ne s’agit pas d’une deuxième vague.

Ce ton rassurant n’est pas celui adopté par les autorités allemandes qui commencent à évoquer cette deuxième vague tant redoutée. C’est le cas du ministre-président du Land de Saxe (est de l’Allemagne), Michael Kretschmer, qui a averti que la deuxième vague “est déjà là”, soulignant que le pays enregistre chaque jour de nouveaux clusters de contamination.

L’institut Robert Koch, l’organe national chargé du contrôle et de la lutte contre les maladies infectieuses en Allemagne, a également fait état d’une forte augmentation du nombre quotidien des nouveaux cas, tandis que que le taux de reproduction du virus est repassé au dessus de 1.

Pour garder la situation sous contrôle, les autorités allemandes ont renforcé les mesures de lutte contre le virus, en adoptant notamment le 16 juillet un projet mis en place par l’Etat fédéral et les régions qui vise à instaurer des mesures de confinement plus sévères au niveau local en cas d’apparition d’un pic de contamination.

En vertu de ce texte, les “interdictions de sortie” seront adoptées au niveau de zones géographiques limitées pour les habitants qui seraient reconfinés après l’apparition d’un foyer de Covid-19.

La tendance à la hausse des contaminations est également constatée en Suisse, au Luxembourg, en Autriche, en République tchèque, ainsi que dans plusieurs autres pays européens. Cette reprise de l’épidémie suscite l’inquiétude de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui a appelé les pays européens à rester réactifs et à faire preuve de vigilance.

“La récente résurgence de cas de Covid-19 dans certains pays après l’assouplissement des mesures de distanciation est certainement une cause d’inquiétude”, a ainsi souligné une porte-parole de la branche européenne de l’OMS.

Ce rebond de l’épidémie en Europe sonne comme une piqûre de rappel qu’il ne faut surtout pas baisser la garde et que la bataille contre le coronavirus est loin d’être gagnée.