Tchéquie: la durée de la prorogation de l’Etat d’urgence suscite des débats tumultueux entre gouvernement et opposition.

Tchéquie: la durée de la prorogation de l’Etat d’urgence suscite des débats tumultueux entre gouvernement et opposition.

lundi, 6 avril, 2020 à 12:06

Prague – Déclaré le 12 mars dernier pour un mois, la prorogation de l’état d’urgence, après le 11 avril en République Tchèque pour cause de Coronavirus, suscite des débats tumultueux entre le gouvernement et des partis de l’opposition quant à la nouvelle durée du confinement et l’arrêt des services à l’exception de ceux d’urgence (magasins des produits alimentaires, pharmacies et cabinets médicaux).

Le gouvernement plaide pour la prorogation de l’état d’urgence pour une durée d’un mois soit jusqu’à la mi-mai prochaine en vue de mieux faire face à la pandémie de Covid19, alors que des partis de l’opposition emmenée par le parti social démocrate (CSSD) plaide pour une durée de 15 jours.

Le chef de la cellule de crise, mise sur pied par le gouvernement au lendemain de l’apparition du Covid19 dans le pays, Jan Hamacek, qui est également ministre de l’intérieur, a annoncé qu’il allait demander au Premier ministre, Andrej Babis, et leader du parti ANO (action des citoyens mécontents), la prolongation de l’état d’urgence de 30 jours pour prendre fin à la mi-mai.

L’opposition, qui au début semblait accepter une prorogation de l’état d’urgence tel que préconisée par l’exécutif, est montée au créneau suite à la publication par l’hebdomadaire tchèque “Respekt” d’une information selon laquelle le ministère de la défense envisagerait que le gouvernement et le Premier ministre puissent disposer, aux dépens du parlement, de l’essentiel des pouvoirs pour diriger le pays lors de certaines situations de crise, comme celle que traversent actuellement les Etats européens en raison de la propagation du Coronavirus.

Cette information a créé un tollé général au sein des partis de l’opposition et une frange de l’opinion publique qui y voient l’éventualité d’une dérive autoritaire du genre de celle du Premier ministre hongrois, Victor Orban.

Le parlement hongrois a voté le 30 mars dernier une loi octroyant à M. Orban le droit de légiférer par ordonnances dans le cadre d’un état d’urgence à durée indéterminée. L’opposition hongroise juge “disproportionnée” cette décision prise pour lutter contre le nouveau coronavirus.

L’opposition tchèque craint justement que le Premier ministre, Andrej Babis, emboite le pas à son homologue hongrois et obtient le droit de légiférer en lieu et place du parlement durant la période du Covid19 en vue de proroger l’état d’urgence pour une période indéfinie sans demander l’aval de l’organe législatif.

Si la proposition est approuvée par les députés tchèques, l’état d’urgence déjà récemment prolongé jusqu’au 11 avril, pourrait se poursuivre jusqu’à la mi-mai, alors que l’opposition souhaite une reconduction de deux semaines et le non octroi des pleins pouvoirs au Premier ministre durant la période du Coronavirus.

M. Babis, richissime homme d’affaires et magnat de la presse, s’est insurgé contre les intentions que lui prête l’opposition de vouloir s’emparer des pouvoirs législatifs.

Il a démenti l’information, expliquant qu’il ne s’agissait là que des évaluations d’un travail mené depuis 2015 suite à une demande du gouvernement de l’époque pour évaluer les possibilités de faire face aux situations menaçant la sécurité de l’état.

Placé sous le feu des partis de l’opposition et une partie des médias tchèques, le chef du gouvernement se trouve en mauvaise posture puisque la Commission européenne l’accuse de “conflits d’intérêts” liés à des fonds européens dont aurait bénéficié son groupe composé de plusieurs centaines de sociétés spécialisées notamment dans l’agriculture, l’agroalimentaire, la construction, la chimie et les médias.

M. Babis a réaffirmé que la question de demander au parlement de lui octroyer les pleins pouvoirs durant la pandémie du Covid19 ne serait pas débattue en conseil des ministres.

Des experts en droit constitutionnel, cités par des médias tchèques, ont confirmé que la possibilité de permettre à l’exécutif de légiférer à la place du parlement était effectivement discutée depuis plusieurs années dans le but de permettre au gouvernement de faire face aux situations d’urgence du genre de celle du Covid19.

A l’instar des autres pays européens, la Tchéquie a pris des mesures drastiques au lendemain de l’apparition du premier cas du Coronavirus sur le sol tchèque, pour tenter d’enrayer l’épidémie. Les frontières ont été fermées tout comme les établissements de l’enseignement et les liaisons aériennes suspendues.

La Tchéquie compte jusqu’à présent 4587 personnes contaminées au Coronavirus, 67 décès tandis que 96 ont été déclarées guéries de la maladie, selon un décompte établi par le ministère de la santé.

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