Le torchon brûle à nouveau entre Bruxelles et Ankara

Le torchon brûle à nouveau entre Bruxelles et Ankara

samedi, 26 novembre, 2016 à 11:39

    Par Rahal Taoussi

    Bruxelles- Les relations, souvent tumultueuses, entre l’Union européenne (UE) et la Turquie se sont à nouveau détériorées ces derniers jours, pâtissant des mesures prises par le président turc Recep Tayyip Erdogan à la suite de la tentative de coup d’Etat avortée en juillet dernier, mesures que Bruxelles juge ‘’répressives’’ et ‘’anti-démocratiques’’.

    La dernière péripétie en date a été celle provoquée, jeudi, par le Parlement européen qui a appelé au gel temporaire des négociations d’adhésion de la Turquie à l’UE, en raison estime-t-il, de « la répression disproportionnée” menée dans ce pays au lendemain de la tentative de coup d’Etat.

    Dans une résolution adoptée à 479 voix pour, 37 contre et 107 abstentions, le Parlement a affirmé que “la Turquie est un partenaire important de l’Union européenne”, tout en signalant que ‘’les mesures gouvernementales ne font qu’éloigner ce pays de la voie européenne”.

    La résolution a condamné fermement les “mesures répressives disproportionnées” prises par le gouvernement turc depuis la tentative de coup d’État, soulignant qu’elles “violent les droits fondamentaux et les libertés protégés par la Constitution turque”.

    Le Parlement a indiqué qu’il s’engage à revoir sa position “une fois que les mesures disproportionnées prises dans le cadre de l’état d’urgence en Turquie auront été levées”.

    La réaction des dirigeants turcs à la résolution du Parlement européen adoptée à Strasbourg ne s’est pas fait attendre puisque le président Erdogan a menacé, vendredi, d’ouvrir les frontières du pays pour laisser passer les migrants vers l’Europe, signifiant du coup qu’il pourrait remettre en cause l’accord signé en mars dernier, entre Bruxelles et Ankara en vue de réduire l’arrivée de réfugiés en Europe.

    La Turquie va ouvrir ses portes frontalières aux réfugiés et migrants pour rejoindre les pays européens si l’UE va plus loin, a mis en garde le président turc.

    De même la résolution du Parlement européen a été qualifiée de “nulle et non avenue” par le ministre turc des Affaires européennes Omer Celik.  Cette décision est “nulle et non avenue”, dénote un “manque de vision” et “restera dans l’histoire comme très mauvaise”, a déclaré à la presse M. Celik.

   De son côté, le Premier ministre turc Binali Yildirim a jugé insignifiante” la décision du PE, disant attendre des dirigeants européens ‘’qu’ils élèvent leur voix contre ce manque de vision”.

     La menace du président turc a été prise au sérieux par l’Allemagne, un des pays de l’UE qui a le plus ouvert la porte aux réfugiés qui déferlaient sur l’Europe en provenance des différentes zones de conflit, avant de se rétracter à cause de l’ampleur des flux et sous l’effet des oppositions internes.

   “Menacer” l’accord entre l’UE et la Turquie sur les migrants “n’avance à rien”, a déclaré vendredi la porte-parole de la chancelière Angela Merkel à l’adresse du président turc.

   “Nous considérons l’accord entre la Turquie et l’Union européenne comme un succès commun et la poursuite de cet accord est dans l’intérêt de tous les acteurs (…). Des menaces des deux côtés n’avancent à rien”, a-t-elle dit.

    La Grèce a fait part, à son tour, par la voix du ministre-adjoint grec à la Défense, Dimitris Vitsas, de son “inquiétude” quant à une éventuelle remise en cause de cet accord.      

   “Ce genre de déclarations nous inquiète et nous sommes vigilants”, a-t-il ajouté, soulignant que la Grèce “ne veut en aucun cas que tombe l’accord UE-Turquie” visant à couper la route migratoire égéenne. ‘’La Grèce fera tout pour maintenir cet accord”, a souligné le responsable grec.

    Confrontés aux flux de migrants sans précédent qui submergeaient le vieux continent, fuyant les guerres civiles en Syrie, en Irak ou en Afghanistan ou en quête de conditions de vie meilleures, les 27 dirigeants européens ont, dans un premier temps, mis en place un plan de relocalisation de 160.000 réfugiés et demandeurs d’asile à travers les pays du vieux continent.

   Qualifié de «grand raté de l’Europe», ce plan n’a pas fait long feu du fait que certains États membres traînaient clairement des pieds et ne fournissaient pas les places d’hébergement nécessaires pour mettre en œuvre le mécanisme de relocalisation.

   L’Europe se tourna alors vers la Turquie pour solliciter son aide dans l’espoir de stopper les arrivées massives de migrants.

  Le 18 mars dernier, Bruxelles et Ankara ont signé un accord à cet effet fondé sur le principe des retours des personnes arrivées irrégulièrement et celui du «un (migrant renvoyé) pour un (réfugié accueilli)».

   Le deal, très critiqué par les ONG de défense des droits de l’Homme et même par l’ONU, prévoit ainsi le retour vers la Turquie de tous les «migrants irréguliers» arrivés dès le 20 mars en Grèce.

    En contrepartie, l’Union européenne devait accorder à Ankara quelque trois milliards de dollars, ainsi que l’exemption de visa pour les courts séjours en faveur des ressortissants turcs.

   Mais des désaccords ont ensuite surgi entre les deux parties sur le processus de libéralisation des visas, d’autant que le Parlement européen a refusé de s’en saisir, estimant que les critères prévus par la législation de l’UE n’ont pas encore été complétés par la Turquie.

    Autre pierre d’achoppement, l’Europe exige notamment d’Ankara de réviser sa législation sur le terrorisme, jugée trop large selon les critères européens.

   Si cette énième crise fragilisera encore davantage les rapports entre l’UE et la Turquie, elle ne sonnera pas pour autant le glas de cet accord qui a permis de réduire considérablement l’afflux de migrants, de l’avis des observateurs.

   Néanmoins, la nouvelle escalade dans les relations entre Bruxelles et Ankara ne manquera pas d’hypothéquer encore plus la sempiternelle requête de la Turquie quant à son adhésion à l’UE. Les deux parties avaient pourtant confirmé leur volonté de relancer ce processus à la faveur de l’accord de mars dernier sur la gestion des flux migratoires.

 

 

 

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